Les musicien.ne.s de création veulent sortir de la précarité 

La Fédération Genevoise de Musique de Création (FGMC) lance #paietonartiste, une campagne de sensibilisation sur la situation des artistes dans ce domaine, afin de soutenir la revendication d’une meilleure dotation de ce milieu, dans les budgets des collectivités publiques.

Jusqu’à la fin du mois de juin, la FGMC diffusera sur les réseaux sociaux et sur son site internet des témoignages vidéo de musicien.ne.s, relatifs à leurs conditions de travail, souvent précaires et peu favorables à la création.

Dotation inégale

Plusieurs artistes au rayonnement national et international se sont prêté.e.s au jeu, à l’instar de la chanteuse, productrice, auteure-compositrice Danitsa. « Si même les artistes qui bénéficient d’un fort succès médiatique parlent d’un manque de fonds, réagit la présidente de la FGMC Béatrice Graf, c’est que le problème s’étend très largement. » Pour cette dernière, l’origine de ce problème est claire : *« À l’heure actuelle, souligne-t-elle, 87% des subventions publiques vont à la musique de patrimoine, contre 6% pour les musiques actuelles de création. »

*Données 2020 | chiffres 2021 en cours d’étude

Pour Céline Frey, compositrice pour les groupes Aloan et Elvett, ces statistiques sont une réalité : « Ayant travaillé dans le monde du théâtre, raconte-t-elle, j’ai pu voir l’énorme différence de revenus comparé à celui de la musique de création, et ce à quantité de travail égale. »

Pour pallier à cette inégalité de traitement, la FGMC souhaite que les fonds ponctuels d’aide à la création et à la diffusion pour les musicien.ne.s de création soient revus à la hausse et alignés sur les dotations des autres domaines artistiques comme ceux de la musique classique, de la danse, du théâtre ou du cinéma.

Les working poors de la culture

Comme le souligne Marc Perrenoud, sociologue, spécialiste des pratiques musicales, « une grande part des musicien.ne.s de création en Suisse ne parvient pas à se professionnaliser à cause des rémunérations souvent trop basses dans ce milieu. »

Entre 2012 et 2015, ce dernier a conçu et dirigé le projet « Musicians Lives » à l’Université de Lausanne, une enquête associant observation de terrain et entretiens auprès de 120 musicien.ne.s en Suisse romande. D’après lui ces faibles revenus affectent notamment la possibilité qu’ont les musicien.nes à cotiser : « En raison des faibles revenus comptabilisés, des courtes périodes d’emplois, du changement fréquent d’employeur ou de mandant et du grand nombre d’heures de travail non rémunérées, les musicien.nes  de création ont un accès très limité aux assurances sociales », appuie-t-il.

Selon l’étude menée par Marc Perrenoud, le revenu mensuel médian des musicien.ne.s suisses se situe entre 3’000 et 4’000 francs. Un sondage effectué auprès des membres de la FGMC révèle quant à lui que 73% gagnent moins de 3’000 francs par mois. « Les musicien.ne.s de création sont les working poors du monde de la culture », regrette Béatrice Graf, reprenant ainsi un terme anglais désignant les personnes qui ont un emploi la majorité de l’année, mais qui demeurent dans la précarité du fait de la faiblesse de leurs revenus.

Retrouvez les témoignages de la campagne #PaieTonArtiste sur YouTube et Vimeo